lundi 20 juin 2011

Run, baby, run.

Si tu te casses la gueule, je saurais pas te rattraper.
Tu marches comme l'équilibriste sur mon trottoir. T'as les godasses qui claquent le pavé, le son métallique de tes semelles qui n'ont pas de frein. Bein fonce.
Moi je te suis, de près. Très près. Mais te casses pas la gueule, j'aurais pas de bras pour te rattraper.
Qu'est ce que tu crois ?
La pente est aussi glissante pour moi. Pleine de flaques de folie, de miroirs distordus d'ondes, les pas de notre assaut déterminé.
Bouge-toi, cours, tourne à gauche et dérape à droite, frayes ton chemin en bousculant les autres sur ton passage si tu veux. Soit meurtrière.
A ce jeu là, on y crève tous les deux.
Emporte tout ce que peux. Ton sillage, le mien, c'est la lame bien droite avec laquelle on se fend.
Et crois-moi, tempête ou pas, jamais la pluie ne pourra laver nos traces.
C'est ton chaos qui baise avec le mien.
C'est l'ombre de ma mort qui entraine la tienne.
Tout au fond de tes entrailles.

dimanche 19 juin 2011

Les chaussettes de minuit - Partie 2-euh.

La porte voisine, suite au brouhaha que mon mécontentement avait fait naître, laissa apparaître une jeune femme abasourdie par la vision que j'offrais.
Elle laissa échapper un cri et se barricada dare-dare dans sa piaule.
Faut avouer que je m'serais fait peur à moi-même. Par contre, elle aurait pu me jeter un peignoir, s'aurait été plus urbain. Décrétant que je ne pouvais décemment rester planté devant la porte (restait-il une once de décence dans cette situation de merde, vraiment ?), j'amorçais une approche vers l'escalier de secours, faisant une escale de camouflage à chaque plante verte disposée décorativement dans le couloir.
J'avais parcouru plus de la moitié du chemin qui me séparait de l'accès aux niveaux inférieurs lorsqu'un geôlier accrédité par le milieu hôtelier émergea sans crier gare des ascenseurs.
Il ne me vit pas tout de suite, figé que j'étais derrière ma plante.
La respiration bloquée, et aussi immobile qu'une Vénus de Milo, j'aurais pu passer inaperçu si d'autres statues d'hurluberlu à poil et en chaussettes décoraient le luxueux couloir.
Manque de bol, c'était pas le cas.
Le gardien, d'abord surpris, fît un bond remarquable avant de me lancer un méchant regard qui en disait long sur l'appréciation de sa découverte.
J'esquissais un sourire crispé, mais sans succès apparent.
_ Qu'est ce que c'est que cette plaisanterie, monsieur ?!
_ Ça n'a rien d'une plaisanterie. Comme vous pouvez le voir, je ne me marre pas du tout. Vraiment, hein.
J'essayais tant bien que mal de dissimuler mon sexe penaud de mes mains, mais j'avais cette manie irrépressible de faire des gestes, comme les italiens, à chaque fois que je l'ouvrais.
Ça aussi, c'était un truc à la con.
Son regard méchant gagnait d'ailleurs en intensité tandis que mon scrotum se faisait la malle.
_ Vous pouvez m'expliquer ce que vous foutez dans le couloir tout nu ? Je vais appeler les flics, je vous préviens !
_ Ah bin non ! C'est idiot, j'ai euh... entendu un truc derrière la porte et pour rassurer mon épouse, je suis allé voir, mais ça s'est refermé sur moi, pis...
_ Pourquoi votre femme ne vous ouvre-t-elle pas ?
_ C'est qu'elle ne piste pas un traitre mot de français, voyez-vous. Et puis moi, le suédois, ça me laisse un goût de père-noël dans la bouche.
Il ne semblait pas gober mon histoire. Je pouvais pas lui en vouloir, en fait. J'avais juste l'air d'un couillon pervers en liberté.
_ Bon, indiquez moi votre chambre, nous allons voir ça.
Je l'y conduisit, en priant pour que Elke me prit en pitié. Ou en tout cas, qu'elle me laisse entrer, quelle que fût sa raison, dont je me foutais éperdument au vu de la situation.  Le maton d’hôtel frappa et demanda qu'on lui ouvre, d'une voix de stentor qu'on aurait privé de lyrisme. Le sas du salut s'ouvrit, laissant Elke apparaitre en peignoir blanc.
_ Madame, cet individu est-il bien votre époux ?
Il me désigna d'un vague geste écoeuré -j'ajoute d'ailleurs que j'en fût meurtri davantage. La grande blonde baragouina un truc à couper à la serpette, mais clairement, ça sentait l'sapin.
Le type me regarda plus furieux que tout à l'heure, si c'était possible.
_ Va falloir m'accompagner, maintenant, monsieur.
_ Ah bin houla...
Mon intégrité allait se jouer sur cet instant crucial. Je devais réagir, et tout de suite. Comme dans les films, et tant pis si la bistouquette prend la fraiche. Je devais sortir la grosse artillerie.

Les chaussettes de minuit - Partie 1

J'avais beau frapper à la porte comme un forcené, vociférer, m'égosiller, geindre, gronder et me gratter les fesses, rien n'y faisait.
Malheureusement pour moi, les portes de l’hôtel étaient solides, et du haut de ma carrure de gringalet, il m'aurait fallut un bélier du GIGN pour la forcer.
Elke, malgré mes tentatives de négociation aussi nombreuses que variées, faisait la sourde oreille.
Il m'apparaissait de plus en plus évident que je pouvais me brosser pour entrer dans la chambre. La situation était consternante.

J'avais dû user de tous mes charmes pour convaincre cette blonde plantureuse et nettement plus grande que moi de m'accompagner dans cet hôtel.  D'ailleurs, le prix de la chambre m'avait coûté un bras. Une fois dedans, j'avais opté pour l'atomisation pure et simple de mon compte en banque et commandé une bouteille de moët-chandon.
La garce picolait vite et profita lâchement que je finisse de la séduire par une conversation -ou plutôt un monologue- sur la vilaine conspiration internationale à laquelle j'imputais la mort de Lady Di.
Of course, j'étais parfaitement conscient qu'elle s'en foutait royalement. Mais mon assurance sur le sujet et le fait qu'elle ne parlât que quelques mots de français m'octroyait un statut bien au-delà de la qualité du thème abordé.
Lorsqu'elle eu terminé de téter son champagne, elle ôta son chemisier sans crier gare, visiblement désireuse que je la tête à mon tour. J'en perdis le fil de mon discours et me lançait à l'assaut de sa poitrine gigantesque, mes petites mains ressemblant à des scouts en pleine ascension de l’Himalaya.
Il ne nous fallut guère longtemps avant de nous retrouver nus et prêts à copuler comme des bêtes agitées de spasmes. Survint alors l'incident inexplicable qui me valut cette fâcheuse posture.

Elke désigna mes pieds, et sembla communiquer son mécontentement quant aux chaussettes que je portais toujours. Je lui répondis, avec un sourire qui se voulait rassurant, qu'il fût exclu que je les ôta.
Non pas que mes panards fussent difformes, mycosés, nauséabonds ou vernis. Non. Je considérais simplement, et ce depuis ma plus tendre enfance, que les chaussettes étaient le dernier rempart vers la nudité la plus extrême. Je n'en changeais que dans la plus grand intimité. Même ma pauvre mère n'avait plus aperçue un bout d'orteil depuis mes dix ans.
Je n'avais donc jamais enlevé cette partie vestimentaire pour baiser. Mes précédentes conquêtes ne me l'avait guère vraiment reproché, par ailleurs.
Elke, elle, semblait furax. Quand il advint évident que mes précieuses chaussettes ne voleraient pas à travers la luxueuse chambre d'hôtel, elle me saisi par les roupettes et m'entraîna  vers la porte dite "Exit". Ainsi choppé, il me fût difficile de la réprimander virilement de son geste scandaleux et retorse.
Voilà où j'en étais, donc.
Sur le pas de la porte, à poil, mais Dieu merci, j'avais encore mes chaussettes.